Beaucoup de facteurs à escompter
Maintenant que nous avons franchi le premier anniversaire de l’invasion de l’Ukraine, plusieurs pourraient avoir l’impression que les répercussions inflationnistes diminuent. Prenons les prix européens du gaz naturel à titre d’exemple : ils sont tombés à des niveaux inférieurs à ceux auxquels ils se négociaient avant l’invasion. Bien que le risque de futurs pics énergétiques soit loin d’être écarté, l’énorme pression inflationniste de la guerre en Ukraine s’est dissipée pour l’instant.
Les contraintes liées à la chaîne d’approvisionnement ont également eu une incidence importante sur l’inflation, bien qu’un bon nombre d’analystes estiment que les goulots d’étranglement liés à la Covid sont en grande partie derrière nous. Les primes de prix dans des secteurs clés, comme celui de l’automobile, disparaissent et les pressions à la hausse semblent avoir atteint un sommet dans certains secteurs manufacturiers.
Les banques centrales ont réagi à la pandémie en suivant le même plan de match qu’elles avaient utilisé pour la crise financière mondiale en ayant recours à l’assouplissement quantitatif. Toutefois, nous avons été témoins en 2022 d’un revirement de situation alors que les banques centrales tentaient de regagner leur crédibilité et de rétablir leur politique monétaire. Les mesures d’assouplissement ont cédé la place à un resserrement quantitatif : les bilans ont été progressivement réduits et les liquidités excédentaires ont été retirées.
La prudence est encore de mise
Bon nombre des facteurs mentionnés ci-dessus suggèrent que l’inflation se dirige vers une baisse, mais il y a encore des problèmes tenaces qui pourraient indiquer le contraire. Il s’agit de rester prudent dans nos scénarios, car d’autres facteurs pourraient fort bien maintenir l’inflation plus élevée que prévu.
Ces facteurs comprennent les attentes salariales, la Chine, les marchandises et potentiellement d’autres éléments imprévisibles. Alors que l’inflation des prix des produits est largement tributaire des coûts de transport et des coûts de la chaîne d’approvisionnement, l’inflation des services dépend grandement des salaires et des attentes salariales. Par conséquent, la réouverture de la Chine pourrait être à la fois inflationniste et désinflationniste. Rouvrir les chaînes d’approvisionnement a un effet désinflationniste, mais en tant que source importante de la demande mondiale, la réouverture de la Chine sera inflationniste pour les biens de consommation et les matières premières.
Le pétrole et les matières premières en général continuent de mêler les cartes. Les prix des produits de base ayant reculé au deuxième semestre de 2022, plusieurs estiment qu’il ne s’agit plus d’une source importante de pression inflationniste. Cependant, les États-Unis ont annoncé qu’après avoir réduit leurs réserves stratégiques de pétrole l’an dernier, ils renverseront la machine et commenceront à racheter du pétrole en 2023. Il est difficile de déterminer la direction des prix, car il pourrait y avoir des écarts d’approvisionnement à long terme. Si la demande à long terme continue de croître, les prix pourraient en fin de compte en souffrir.
Comme toujours, les données sont essentielles
À mesure que nous avançons en 2023, de nombreuses personnes croient que les données sur l’inflation s’avéreront encourageantes, les marchés étant de plus en plus convaincus que le sommet pourrait déjà avoir été atteint. Par précaution, il serait bien avisé de tempérer cet optimisme. À moins que l’activité économique ne se détériore considérablement, les banques centrales principales sont susceptibles de faire preuve de prudence.
Il est possible que les réductions de taux soient encore loin et que les banques centrales aient besoin de preuves claires que l’inflation du secteur des services commence à fléchir avant de procéder à un assouplissement de leurs politiques monétaires. Nombreux sont ceux qui estiment que cela ne se produira pas avant la fin de 2023 au plus tôt.
Cependant, à plus long terme, la désinflation des prix des biens pourrait s’estomper et laisser les banques centrales potentiellement confrontées à un environnement beaucoup plus difficile qu’auparavant.